LA
DOCTRINE DU LEBENSRAUM (ESPACE VITAL)
Dans son livre "Mein Kampf"
(Mon Combat) paru en 1925, Adolf Hitler estime que l'Allemagne est
surpeuplée et considère qu'il faut repousser les frontières de l'Allemagne vers
les pays de l'Est pour reconquérir un espace vital qui apportera matières
premières et subsistances. Le 25 octobre 1929, débute la crise mondiale avec le
crack boursier de New-York. Cette crise atteint son apogée le 13 juillet 1931 avec
l'effondrement de la banque de Darmstadt et de la banque nationale. De
nombreuses entreprises font faillite. Mais cette crise profonde profite au parti
nazi N.S.D.A.P. (Nationalsozialistiche Deutsche Arbeiterpartei) et lui
apporte pourtant des voix. Ainsi, le 31 juillet 1932, il devient le parti le
plus important d'Allemagne aux élections du Reichstag avec 36,9% des voix.
Le 5 novembre 1937, Hitler convoque à
la Chancellerie du Reich à Berlin son conseiller militaire, le colonel-comte
Friedrich Hossbach et quelques hauts dirigeants dont le Ministre de la Guerre
Werner von Blomberg, le Ministre des Affaires Etrangères Konstantin von Neurath,
le Commandant de l'Armée Werner von Fritsch, le Commandant de la Marine Erich
Raeder, le Commandant de l'Aviation Hermann Göring. Entre-autres sujets, il leur
annonce qu'il veut régler par la force la question du manque d'espace vital. Il
ne fallut pas attendre longtemps pour voir Hitler passer aux actes.

Le 4 février 1938, il reprend le
Ministère de la Guerre du Reich et forme un haut commandement des forces armées.
Les troupes allemandes entrent en Autriche les 12 et 13 mars 1938, ce qui
entraîne l'annexion de ce pays à l'Allemagne. Le 1er octobre de cette année,
c'est l'occupation du pays des Sudètes (population germanophone habitant la
Bohème et la Moravie). La Tchécoslovaquie est occupée à son tour les 15 et
16 mars 1939. La Pologne, qui pressentait sont tour arriver, eut des entretiens
les 26 et 27 mars entre le Ministre des Affaires Etrangères allemand Von
Ribbentrop et l'ambassadeur polonais, M. Lipsky. Les revendications de
l'Allemagne sont clairement posées : le retour à l'Allemagne de Dantzig ainsi que
la construction d'une autoroute et d'une ligne de chemin de fer à travers le
territoire polonais. Le Ministre des Affaires Etrangères Polonaises, le Colonel Josef Beck déclare que la Pologne est prête à
faire la guerre plutôt que de voir le statut de la ville changer.
C'est à ce moment là que la
Grande-Bretagne et la France, qui menaient une politique d'apaisement depuis
cinq ans, ce qui était une profonde erreur, se préoccupent enfin de cette situation.
Le 31 mars 1939, Neville Chamberlain, Ministre des Affaires Etrangères de la
Grande-Bretagne annonce à la Chambre des Communes qu'une garantie d'indépendance
est donnée à la Pologne, suivie le 13 avril par la France qui confirme
l'alliance franco-polonaise. A partir de ce moment, le contact est interrompu
entre l'Allemagne et la Pologne. Le 23 août, l'Allemagne signe un pacte de non
agression avec l'Union Soviétique. Une convention secrète règle la répartition
projetée de la Pologne et des Etats baltiques. Ce pacte permettra à Hitler
d'effectuer les opérations futures à venir en toute impunité. Un pacte
anglo-polonais est signé le 25 août qui assure l'intervention automatique en cas
d'agression ou d'une action contre l'indépendance de la Pologne. Devant la
pression de la France et de la Grande-Bretagne, les allemands acceptent d'ouvrir
la discussion avec les polonais et demandent qu'un plénipotentiaire polonais se
présente le 30 août à Berlin, afin de lui remettre un règlement en 16 points.
Mais ce n'est que le 31 août que l'ambassadeur polonais, M. Lipski, se présente
devant Von Ribbentrop, qui constate que l'envoyé de la Pologne n'a pas les pleins
pouvoirs et met fin à l'entretien. Belle occasion de rejeter la responsabilité
des événements en cours sur la Pologne en annonçant qu'elle a refusé les
propositions d'Hitler. Le moment est venu pour l'Allemagne de passer à
l'action. Il ne suffit plus qu'à mettre en route un incident de frontière,
préalablement organisé par la Gestapo (Geheime Staatspolizei), c'est le début de
l'opération "Himmler"...
L'OPERATION HIMMLER
Durant le mois d'août 1939, au siège
de la Gestapo installée au n° 8 de la Prinz Albrecht Strasse à Berlin on s'active.
Heinrich Muller, surnommé "Gestapo-Muller", chef tout puissant de la Gestapo, le
SS Obergruppenführer Reinhard Heydrich et un petit groupe d'hommes préparent
activement et dans le plus grand secret une opération qui fournira à Hitler le
prétexte pour envahir la Pologne. Leurs ordres, ils les reçoivent directement de
la chancellerie... Cette opération ne sera connue qu'au moment du procès de
Nuremberg...
L'opération est confiée au SS
Sturmbannführer Alfred Naujoks, spécialiste des opérations "spéciales" de la
Gestapo. Elle consiste à prendre possession de la Station de Radiodiffusion allemande
située à Gleiwitz (Gliwice), près de la frontière polonaise, à 490
kilomètres de Berlin, et de faire croire qu'elle a été investie par les troupes
polonaises.


Siège de la Gestapo
à Berlin, 8 Prinz Albrecht
Strasse - D.R.
Cliquer ... |

Entrée de la station radio
Cliquer ... |

Entrée de la station radio
Cliquer ... |

La maison de la régie
Cliquer ... |
|
|
|
|

Tour d'émission en bois
Cliquer ... |

Gros plan extérieur
sur la structure de
la tour d'émission
Cliquer ... |

Gros plan intérieur
sur la structure de
la tour d'émission
Cliquer ... |

Tour d'émission
- la nuit -
Cliquer ... |
Afin de rendre cette opération
plausible, les SS ont besoin de prisonniers qu'ils appellent cyniquement "des
conserves" et qui sont fournis par le camp de concentration de Sachsenhausen.
Ils revêtent l'uniforme polonais et des produits mortels leur sont injectés.
Mais il semble que ces prisonniers n'aient finalement pas été utilisés. Par
contre, Franciszek Honiok, un silésien d'origine polonaise, arrêté la veille à
Lubie, dans son village natal (19 kilomètres de Gleiwitz), sera drogué
et revêtu de l'uniforme polonais, pour servir de "conserve" vivant, mais sera
néanmoins exécuté à l'issue de l'opération afin de servir de preuve de l'attaque polonaise.
Ils attendent l'ordre transmis
par téléphone de Reinhard Heydrich qu'ils reçoivent dans la soirée du 31 août
sous une forme codée : "Grossmutter ist gestorben" (Grand-mère est
décédée). L'opération est déclenchée à 20h00. Les faux soldats polonais
pénètrent dans la station radio et terrorisent les techniciens allemands de la
radio. L'un d'eux lance un message sur les
ondes en ces termes :
"Attention ! Ici Gleiwitz. La station
de radiodiffusion se trouve en mains polonaises ..." |
La suite du message n'est pas passée
sur les ondes suite, semble-t-il, à des erreurs d'ordre technique.
Finalement tout le monde se retire en
tirant des coups de feu en l'air, laissant derrière eux le cadavre de Franciszek
Honiok dans le corps duquel on loge préalablement, à 20h10, quelques balles, et qui fournira ainsi la preuve de l'attaque polonaise.
D'autres opérations se sont également
déroulées dans les mêmes conditions en d'autres lieux, comme des saccages de
postes frontières allemands dans lesquels on disperse des photographies. Mais ces
événements n'auront pas la portée de celui qui s'est
déroulé à Gleiwitz.
Le lendemain, 1er septembre, Hitler
annonce au Reichstag qu'il déclare la guerre à la Pologne, mais se tait
volontairement sur l'action qui s'est déroulée à Gleiwitz :
"Je n'ai pu vous convoquer que ce
matin. Grâce à l'organisation modèle, vous avez pu répondre en grand nombre à la
convocation. Il y a plus de 100 absents ici, ils sont ailleurs, là où ils sont à
leur place, auprès de l'armée. Ils feront là leur devoir.
Depuis des mois, nous souffrons tous,
sous le cauchemar d'un problème créé par Versailles et qui était devenu pour
nous insupportable.
Dantzig et le corridor furent et sont
allemands. Dantzig a été séparé de nous, le corridor annexé par la Pologne. mais
surtout les minorités allemandes ont été maltraitées de la manière la plus
douloureuse.
Comme toujours, j'ai cherché à créer
ici aussi un changement par la voie de propositions en vue d'une révision
pacifique. C'est un mensonge, lorsque l'étranger affirme que nous essayons de
faire valoir nos revendications révisionnistes dans le seul but de faire
pression sur le monde...."
|

Dans
un discours dont le lieu n'a pu être déterminé il dit :
(mp3 - 314 ko)
"Polen hat, heute nacht zum
ersten mal auf unserem eigenen Territorium, auch mit bereichs regulären Soldaten
geschossen. Zeit funf Uhr funf und vierzig wird jetzt zurück geschossen. Und von
jetzt ab, wird bomben mit bomben vergolten"
"Cette nuit et pour la première fois, sur notre
territoire, la Pologne a ouvert le feu sur nos soldats des troupes régulières.
Depuis 5h45, nous avons contre-attaqué. Et désormais, nous rendons bombes contre
bombes."
|
De son côté,
le Gauleiter Forster proclame le
rattachement de Dantzig au Reich et transmet un télégramme à Hitler :
"Mon
Führer.
Je viens
de signer et de mettre en vigueur la loi fondamentale suivante sur la réunion de
Dantzig avec le Reich allemand :
Article
1er - La constitution de la Ville Libre est abolie avec effet immédiat.
Article 2
- Tout le pouvoir de l'Etat et le pouvoir exécutif sont en possession du chef de
l'Etat
Article 3
- La Ville Libre de Dantzig constitue, avec tout son territoire et tout son
peuple une partie intégrante du Reich allemand et cela avec effet immédiat
Article 4
- Jusqu'à l'introduction du droit allemand par le Führer, toute la législation
reste en vigueur découlant de la constitution actuelle." |
Le même
jour, Hitler répond par télégramme au Gauleiter Forster :
"J'accepte
la proclamation sur le retour de Dantzig au Reich allemand. Je vous remercie
ainsi que tous les hommes et femmes de Dantzig pour la fidélité inébranlable
qu'ils ont gardée envers le Reich allemand. La Loi sur le retour de Dantzig au
Reich sera immédiatement exécutée" |
Pendant ce temps, les troupes de la
Wehrmacht se déversent sur le sol polonais. Les journaux relatent les
événements. Ainsi, en France, dans le journal "Le Matin" du 2 septembre 1939, on
peut lire le communiqué officiel de l'ambassadeur de Pologne en France :
"L'Allemagne a violé la frontière polonaise sur quatre points. Des informations
allemandes au sujet d'une prétendue violation du territoire
allemand par la Pologne sont de pure invention. De même que la fable d'une
attaque 'd'insurgés' polonais sur Gleiwitz" |
Le même
jour, la France décrète l'ordre de mobilisation générale.

Après avoir lancé des ultimatums que
l'Allemagne rejette, la France et la Grande-Bretagne, alliées de la Pologne,
déclarent la guerre à l'Allemagne le 3 septembre, mais n'interviennent pas.
C'est le début de la deuxième guerre mondiale mais également de la "drôle de
guerre". Le 17 septembre, les troupes soviétiques pénètrent en Pologne ne
laissant plus aucune chance à ce pays qui s'écroule sous les deux attaques
conjointes. Les dernières troupes polonaises déposent les armes le 1er octobre
et les premiers travailleurs forcés polonais arrivent en Allemagne le 25
octobre.
On considère aujourd'hui que
Franciszek Honiok fut le premier mort de la Seconde Guerre Mondiale. La vérité
sur cette opération n'a vu le jour qu'après le procès de Nuremberg. Quelques
bribes sur cette opération furent données par Alfred Naujocks dans le n° 46 du
magazine "Der Spiegel" paru le 13 novembre 1963.
LA STATION DE RADIODIFFUSION DE
GLEIWITZ
Cette station radio construite dans
les années 1934/1935 par la société allemande Lorenz, en coopération avec
d'autres entreprises comme Siemens et Telefunken, est constituée de bâtiments et
d'une tour en bois de mélèze mesurant 111 mètres de haut, implantée sur une
surface de 3 hectares. Ses poutres sont assemblées par 16.000 vis en laiton.
Elle est considérée comme la plus haute tour en bois au monde. Elle est entrée
en service le 23 décembre 1935, et portait des antennes d'ondes moyennes qui ne
sont plus en service aujourd'hui. Elle n'a pas eu a subir de bombardements ni de
destruction durant le conflit. Elle fonctionna jusqu'en 1952 pour la
radiodiffusion sur onde moyenne des programmes de radio Katowice puis Wolna
Europa.
Elle a également servi à brouiller les ondes des radios européennes. Finalement
elle arrêta d'émettre
définitivement en 1956.
Aujourd'hui elle est transformée en
musée et peut être visitée. Sa tour porte une cinquantaine d'antennes
différentes (téléphones portables, FM etc ...). Les revenus qui en
découlent assurent de manière durable son entretien et les réparations
nécessaires à sa survie. Elle est magnifiquement illuminée la nuit qui lui
permettent d'être vue de loin.
On
notera qu'il existait une deuxième tour à Gliwice qui a été démolie. Ses
bâtiment abritent aujourd'hui un hôpital.

Plaque apposée sur
la maison d'entrée
Cliquer ... |

La station radio de Gliwice
vu par satellite
Cliquer ... |
MIEUX COMPRENDRE L'HISTOIRE DE
DANTZIG
Cette ville
a été créé en 1807 comme un Etat semi-indépendant par Napoléon Bonaparte. En
1815, elle a été cédée à la Prusse. En 1920, elle est prise sous le contrôle de
la Société des Nations puis rattachée à l'Allemagne lors de l'invasion de la
Pologne par les troupes allemandes en septembre 1939. A la fin de la Seconde
Guerre Mondiale, les soviétiques ont expulsé les habitants allemands et détruit
la ville. Finalement, Staline décide de céder la ville à la Pologne sous le nom
de Gdansk.

|